MÉMOIRE DU CO-OPERATIVE
SUPERANNUATION SOCIETY PENSION PLAN

Introduction

La Co-operative Superannuation Society (CSS) gère le plus important régime de pensions de retraite privé à cotisations déterminées au Canada. Elle a été créée en 1939 à la raffinerie coopérative de Regina suivant le modèle d’une société d’épargnes de retraite britannique. La Co-operative Superannuation Society a été constituée en 1943 grâce à une loi privée du Parlement de la Saskatchewan en tant qu’entreprise sans but lucratif reposant sur ses membres, avec pour mandat d’agir à titre d’administrateur et de fiduciaire du régime de pensions.

Cette entreprise regroupe environ 440 coopératives et caisses d’épargne et de crédit dans l’ensemble du Canada. Elle compte plus de 35 000 membres cotisants et à acquisition déferrée. Elle verse des prestations à plus de 6 000 retraités, et gère 5 fonds d’investissement au nom de ses membres. La valeur totale des avoirs sous sa gouverne atteint environ 3 milliards de dollars. Son taux de dépenses de gestion est de 25 points de base approximativement.

Résumé

Contexte

·         En 2005, on a modifié le Règlement de l’impôt sur le revenu pour permettre aux retraités membres d’un régime de pensions à cotisations déterminées de toucher des prestations périodiques directement de celui-ci. Ces prestations sont dites « variables ».

·         Selon la définition du Règlement de l’impôt sur le revenu, les prestations variables sont des « prestations viagères ». Les prestations de retraite viagères, qu’elles relèvent d’un régime à prestations déterminées ou à cotisations déterminées, doivent être périodiques et ne peuvent commencer à être versées avant la retraite[1].

·         L’impôt sur le revenu est calculé, retenu et remis de la même façon pour toutes les prestations périodiques, qu’il s’agisse d’un régime à cotisations déterminées (CD) ou à prestations déterminées (PD).

·         N’étant pas des versements périodiques d’un tel revenu, les retraits de FERR font l’objet de règles fiscales distinctes pour ce qui est des retenues et des remises.

Enjeu

Le projet de loi C-10 étudié lors de la deuxième session de la 39législature (2009) proposait l’ajout des prestations variables dans la définition de « revenu de pension », mais non dans la définition de « revenu de pension admissible » figurant au paragraphe 118(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Or, le versement des prestations de retraite déterminées est inscrit dans les deux définitions. Seules les personnes recevant des « revenus de pension admissibles » peuvent réclamer une déduction à ce chapitre et partager ces revenus avec leur conjoint(e) dès le début de leur retraite.

Bien que les prestations variables soient des revenus de retraite versés aux bénéficiaires, selon le ministère fédéral des Finances, elles ne doivent pas se prêter à une déduction ou à un partage avec le (la) conjoint(e) avant l’âge de 65 ans, comme dans le cas des retraits de fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR). Pour les raisons indiquées ci-dessous, nous estimons que les prestations variables devraient être admissibles à une déduction et à un partage des revenus dès le moment de la retraite, au même titre que les prestations déterminées[2].

Recommandation 1

Pour garantir une fiscalité juste et équitable relativement aux prestations de retraite PD et CD, nous conseillons l’ajout des prestations variables dans la définition de « revenu de pension admissible » au paragraphe 118(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

Motifs

·         D’après la Loi de l’impôt sur le revenu et le règlement afférent, les prestations variables sont des « revenus de retraite viagers » versés à même un régime de pensions enregistré. Par conséquent, les impôts sont retenus, remis et déclarés à l’Agence du revenu du Canada de la même façon que les prestations déterminées, mais différemment des retraits FERR.

·         Tant pour les régimes de retraite PD que CD, le versement périodique des prestations ne peut débuter qu’à partir du moment de la retraite. Donc, contrairement aux FERR, il n’est pas nécessaire de fixer comme limite « l’âge de 65 ans » pour garantir qu’un contribuable touchant des prestations variables est bel et bien retraité.

·         Contrairement à un régime PD, le montant des prestations variables peut être modifié (moyennant certaines réserves). Il ne serait pas difficile d’empêcher les retraités bénéficiaires d’un régime de pension CD d’en profiter pour obtenir indûment des avantages fiscaux.

·         Si on permettait aux bénéficiaires d’un régime CD recevant des prestations variables de réclamer une déduction des revenus de pension et de partager ceux-ci avec leur conjoint(e) dès leur retraite, cela n’entraînerait qu’un coût relativement modeste au plan fiscal.

Analyse

Contexte

Au cours de nos discussions avec les représentants de l’Agence du revenu du Canada en septembre et octobre 2005, ceux-ci nous ont indiqué que « les prestations variables sont des prestations de retraite versées directement à partir d’un régime de pensions enregistré, si bien qu’elles doivent respecter toutes les règles inscrites dans la loi et le règlement de l’impôt sur le revenu en ce qui a trait aux régimes de pension, et non aux FERR. »

Ils nous ont expliqué en particulier les aspects suivants :

Les prestations variables seraient alors imposées selon la « méthode de traitement de la paye » comme les prestations de retraite déterminées, contrairement aux retraits de FERR.

Les prestations variables devraient être déclarées dans la case 16 du formulaire T4A au même titre que les prestations de retraite déterminées, plutôt que sur un formulaire T4RIF s’appliquant aux retraits de FERR. À souligner que si on déclare des prestations variables dans la case 16, cela donne droit à la fois à une déduction des revenus de retraite et à un partage de la pension avant l’âge de 65 ans.

Il n’y aurait pas de retrait minimal obligatoire d’un compte de prestations variables avant l’âge de 70 ans (la limite d’âge actuelle est de 72 ans).

On a apporté en 2007 des modifications subséquentes à la loi et au règlement de l’impôt sur le revenu pour permettre aux couples retraités de partager leurs revenus de pension respectifs. La Loi a aussi été modifiée de façon à ce que les bénéficiaires d’un régime à prestations déterminées puissent prendre une « retraite progressive[3] ».

Bien qu’il ait été rédigé en 2004 en même temps que les modifications instaurant les prestations variables, l’alinéa 118(7)a)iii.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (qui ajoutait les prestations variables dans la définition de « revenu de retraite ») n’est entré en vigueur qu’en 2005. On a plutôt laissé cette disposition en veilleuse pendant trois ans avant son incorporation dans le projet de loi C-10 en 2009.

Les représentants de Finance Canada nous ayant indiqué que le paragraphe 118(7)a)iii.1) était inclus dans le projet de loi C-10, nous leur avons objecté que cette nouvelle disposition contredirait l’avis émis précédemment par l’ARC en ce qui concerne les règles fiscales s’appliquant aux prestations variables. Mais on nous a répondu que cela ne donnerait pas droit à une déduction des revenus de retraite ou à un partage des pensions avant l’âge de 65 ans.

Enjeu

Le paragraphe 106(2) du projet de loi C-10 entraîne la promulgation de l’alinéa 118(7)a)iii.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Cette nouvelle disposition ajoute comme suit les prestations variables à la définition de « revenu de pension » dans l’article 118 de la Loi :

(7)  Le « revenu de pension » touché par une personne durant une année d’imposition signifie :

a)   le total des montants représentant chacun un montant appliqué dans le calcul de son revenu pour l’année :

      (iii.1) un montant... payable périodiquement en vertu d’une disposition d’acquisition d’argent... dans le cadre d’un régime de pension enregistré à cotisations déterminées.

Le paragraphe 118(7) de la Loi définit également la notion de « revenu de pension admissible ». Toutefois, on ne propose pas actuellement d’ajouter à cette définition les prestations variables. C’est un aspect important parce que seuls les contribuables recevant « un revenu de pension admissible » peuvent réclamer la déduction de 2 000 $ au chapitre des revenus de pension avant l’âge de 65 ans, et qu’eux seuls pourront décider de partager leurs revenus de pension avec leur conjoint(e) avant l’âge de 65 ans.

Par conséquent, l’ajout des prestations variables dans la première définition mais non dans la seconde fait que celles-ci seront traitées autrement que les prestations des régimes de pension PD au point de vue fiscal[4]. Jusqu’à l’âge de 65 ans, les retraités d’un régime CD devront donc payer plus d’impôt que ceux d’un régime PD. Nous vous signalons respectueusement que c’est à la fois injuste et inutile.

Recommandation 2

Pour faire en sorte que les prestations de retraite CD et PD soient imposées de manière juste et équitable, nous recommandons d’ajouter les prestations variables dans la définition de « revenu de pension admissible » au paragraphe 118(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

Motifs

Si on ajoute les prestations variables dans la définition de « revenu de pension » mais non dans celle de « revenu de pension admissible » comme le prévoit le projet de loi C-10, les contribuables avec un régime à cotisations déterminées ayant moins de 65 ans devront payer plus d’impôt sur leur revenu de pension que ceux avec un régime à prestations déterminées.

Nous vous faisons respectueusement remarquer qu’aucune raison valable ne justifie une telle iniquité.

1.   Le ministère des Finances du Canada prétend qu’une limite d’âge de 65 ans est indispensable pour garantir que seuls les contribuables retraités pourront réclamer la déduction du revenu de pension et partager celui-ci avec leur conjoint(e). C’est peut-être nécessaire dans le cas des titulaires d’un FERR, mais pas pour les pensionnés. Comme les bénéficiaires d’un régime PD, les contribuables ayant un régime CD ne peuvent pas toucher de prestations variables avant leur retraite. Par conséquent, une limite d’ĝe s’avère redondante et inutile en l’occurrence

2.   Selon le ministère des Finances du Canada, les retraités avec un régime CD qui reçoivent des prestations variables pourraient profiter d’un avantage fiscal indu en variant d’une année à l’autre le niveau de revenu de pension. Si cela pose problème, il serait relativement simple de fixer un plafond au montant des prestations variables susceptibles d’être considérées comme un « revenu de pension admissible ».

Voici deux exemples de limitation possible :

                              i.        le montant annuel que les cotisants à un régime CD auraient acquis en guise de rente au moment de leur retraite;

                            ii.        l’obligation pour les cotisants à un régime CD de conserver au moins 6 p. 100 du solde dans leur compte de prestations variables à la fin de l’année qui précède.

            L’une ou l’autre de ces restrictions empêcherait les contribuables de profiter indûment d’un avantage fiscal grâce à cette flexibilité de paiement.

3.   Selon les représentants de Finance Canada, si on autorise les retraités ayant un régime de pension CD de réclamer la déduction pour le revenu de pension et de partager ce revenu avant l’âge de 65 ans, cela serait injuste pour les épargnants titulaires de FERR. Toutefois, ceux-ci ont le droit de partager leurs revenus via le REER de leur époux(se) sans aucune limite d’âge. Ils peuvent aussi convertir leur REER en RREF et commencer à retirer de l’argent sans même prendre leur retraite. Il est donc raisonnable de fixer une limite d’âge de 65 ans pour que les cotisants à un REER puissent réclamer cet allègement fiscal à titre de retraités.

4.   Il serait peu coûteux au plan fiscal d’autoriser les contribuables à déduire les prestations variables du revenu de pension et à partager les revenus de pension avec leur conjoint(e) dès leur retraite comparativement au coût qu’implique l’octroi de ces mêmes avantages fiscaux aux retraités touchant des prestations déterminées. Environ 900 000 Canadiens ont un régime de pension à cotisations déterminées, soit à peine 20 p. 100 des 4,5 millions de contribuables bénéficiaires d’un régime à prestations déterminées. Par ailleurs, les titulaires d’un régime de pension CD sont portés en général à prendre leur retraite plus tard que ceux ayant un régime de pension PD. Par conséquent, ils touchent ordinairement un « revenu de pension admissible » moins longtemps avant d’atteindre l’âge de 65 ans que les seconds.

Jusqu’à récemment, seules les quatre provinces de l’Ouest autorisaient le versement de prestations variables via leur loi relative aux pensions. Récemment, le gouvernement fédéral du Canada et celui de l’Ontario ont modifié leur loi en la matière pour permettre également le versement de prestations variables. Le traitement fiscal injuste résultant des modifications proposées au paragraphe 118(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu aura donc des conséquences accrues à l’avenir. Nous prions le gouvernement du Canada d’éliminer cette iniquité en incluant les prestations variables dans la définition de « revenu de pension admissible ».



[1]      Dans le cadre d’un régime de retraite à prestations déterminées, le montant de la pension à la retraite dépend d’une formule mathématique, de sorte qu’il est connu à l’avance. Par contre, le montant des cotisations qu’il faut verser pour couvrir les futures prestations est inconnu et varie suivant les taux d’intérêt à long terme et le rendement des marchés boursiers. Au contraire, dans un régime de retraite à cotisations déterminées, le montant des cotisations est connu à l’avance, mais le montant des prestations versées est inconnu et varie suivant les taux d’intérêt à long terme et le rendement des marchés boursiers.

[2]      Dans le cas des retraits de FERR, cette limite d’âge vise à empêcher les contribuables canadiens de se prévaloir de cet allègement fiscal consenti aux retraités avant le début de leur retraite.

[3]      Dans le cas d’une retraite progressive, un employé atteignant l’âge de 55 ans est autorisé, avec l’accord de son employeur, à commencer de toucher des prestations de retraite tout en continuant à accumuler  des cotisations à impôt différé.

[4]      Les versements dans le cadre d’un régime à prestations déterminées sont déjà inclus dans la définition des « revenus de pension admissibles ».